Vladimir Poutine, le président russe, sous-entend que les dirigeants ukrainiens sont des néonazis. Ont-ils de telles idées, des pratiques racistes ? Les Russes d’Ukraine étaient-ils discriminés (défavorisés) en Ukraine ? Philippe Hensmans est directeur d’Amnesty International Belgique francophone. Cette organisation surveille le respect des droits humains partout dans le monde, en permanence. Qu’a-t-elle observé ces dernières années en Ukraine ?

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Est-ce que certains habitants d’Ukraine, par exemple les Russes, étaient victimes de discriminations ?

On a fait état de problèmes dans le Donbass (est du pays), où effectivement, il y avait des violations terribles des droits humains, tant par les services de renseignements et les milices russes que par les Ukrainiens. Maintenant, dans l’Ukraine en général, on n’a pas d’indice de discriminations envers les Russes.

Y a-t-il des nazis en Ukraine ? Sont-ils au pouvoir, au Parlement, ou proches du président ?

Il y en a, comme ailleurs. Mais en Ukraine, il n’y a pas d’élus nazis. L’extrême droite ne représente presque rien dans ce pays par rapport à d’autres, comme la Belgique ou la France. Et le président est juif. Dire de lui qu’il est nazi, c’est évident qu’on est très loin de la réalité (lire l’encadré sur les nazis).

Y a-t-il des milices (groupes armés) d’extrême droite en Ukraine ? Sont-elles proches du pouvoir ou payées par l’État ?

Il y a des milices, comme le bataillon Azov, qui viennent d’être intégrées dans l’armée maintenant, pour être mieux sous contrôle. Dans le passé, des exactions ont été commises, mais de nombreuses choses ont été mises en place par le nouveau gouvernement et des enquêtes sont menées par la justice.

Peut-on dire que Volodymyr Zelensky est un dictateur ?

Non, pas du tout.

Et Vladimir Poutine ?

On n’utilise pas le terme dictateur à Amnesty International, mais si on regarde la définition dans le dictionnaire, c’est un dictateur, oui.

Que pensent les Russes de cette guerre, selon vous ?

Il n’y a pas une seule population russe. Le territoire est grand comme l’Europe, et la population est très dispersée. Donc, pour beaucoup de gens, la seule voie d’information, c’est la télévision officielle, qui dit ce que le pouvoir lui demande de dire. Or, par exemple, le mot « guerre » est interdit dans les médias russes. Par contre, dans les villes, les autres informations circulent, beaucoup de gens savent ce qui se passe et ne sont pas d’accord. Ils manifestent et 15 000 se sont déjà retrouvés en prison. Il y a même des gens qui ont été arrêtés pour avoir montré une feuille blanche — juste une feuille blanche ! — devant l’ambassade d’Ukraine !

Et Internet ?

Facebook et Instagram sont interdits en Russie et les Russes sont en train de créer un grand intranet (réseau interne) pour couper les liens Internet avec l’extérieur.

Est-ce que Poutine sera puni un jour ? Il sera jugé par la Cour pénale internationale, qui juge les crimes de guerre ?

On l’espère et pas seulement lui. Nous finançons un groupe d’avocats pour récolter les plaintes. Des personnes réunissent des preuves de ce qui se passe. Normalement, Poutine et ses proches ne pourront plus voyager dans tous les pays qui ont signé le traité qui a fondé la Cour pénale internationale. Car s’ils y arrivent, ils seront arrêtés et livrés à la Cour. Mais ça prend beaucoup de temps.

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Repères: « Nazis, qu’est ce que ca veut dire? »

Pendant la Seconde Guerre mondiale (1940-45), l’Allemagne était dirigée par Adolf Hitler et son parti national-socialiste (nazi). Les nazis avaient des idées radicales, extrêmes : ils voulaient construire une grande Allemagne peuplée de gens d’une race « pure ». L’idéal, c’était des blonds aux yeux bleus, non juifs, sans handicap, hétérosexuels…

Pour cela, les nazis ont tué des millions de Juifs, d’homosexuels, de gens du voyage (Gitans, Tziganes), de personnes handicapées… Si le parti nazi n’existe plus, il reste toujours des gens qui ont des idées d’extrême droite. On qualifie certains de néonazis.