Durant une semaine, des émeutes ont secoué la France. Elles faisaient suite à la mort de Nahel. En Belgique, quand un policier peut-il faire usage de son arme?

Nahel, un adolescent de 17 ans, a été tué d’une balle par un policier lors d’un contrôle routier à Nanterre, près de Paris. Une vidéo du tir mortel est venue contredire la version policière initiale. Filmée par un témoin et rapidement diffusée sur les réseaux sociaux, elle a fait le tour du monde.

L’incident a provoqué une vive émotion partout en France, avec une semaine de violence, d’émeutes.

Les questions restent nombreuses. Une enquête est en cours pour faire la lumière sur ce qui s’est passé lors du contrôle routier. Le policier qui a tiré sur Nahel est maintenu en détention. Il est mis en examen. Un juge d’instruction a pris cette décision pour avoir le temps d’enquêter. Le policier est mis en examen pour homicide volontaire, c’est-à-dire pour avoir causé la mort d’une personne de façon volontaire.

Et chez nous, serait-ce possible ? Nous avons posé des questions à ce sujet à un enquêteur de la Brigade Judiciaire Centralisée de PolBruNo (police judiciaire).

En Belgique, quand un policier est-il autorisé à porter son arme ?

« Un policier est autorisé à porter une arme de service, explique monsieur Milo qui est inspecteur de police et enquêteur de la Brigade Judiciaire Centralisée de PolBruNo. Mais les agents de police et les inspecteurs de police qui travaillent en patrouille, ne portent leur arme de service que lorsqu’ils sont sur le terrain. A titre exceptionnel, ils sont autorisés à reprendre leur arme de service à la maison. C’est arrivé par exemple au moment des attentats. Ils peuvent, dans ce cas-là, porter cette arme sur le chemin du travail. Mais c’est exceptionnel et ils doivent avoir une autorisation du chef de corps (la personne qui dirige la zone de police). Bien sûr, certains services spécialisés comme la DSU (Direction des unités spéciales) ont des dérogations (autorisations). Celles-ci permettent à leurs agents de porter leur arme en dehors de leurs temps de service et en dehors du trajet maison-travail. « 

Que considère-t-on comme une arme ?

« La matraque, le pepper spray (ce spray au poivre met la personne dans l’incapacité de faire des gestes de tous les jours si elle est gazée, et ce durant une ou plusieurs heures) et l’arme à feu. »

Quand un policier peut-il en faire usage?

 » Les lois réglementent l’usage des armes. On a la loi sur la fonction de police. Elle détermine dans quelles circonstances spécifiques on peut faire usage de la violence et de quel type de violence. On doit respecter une certaine gradation en fonction des événements auxquels on est confronté. L’arme à feu est le dernier recours auquel il faut faire appel pour stopper un fait de violence. Il y a aussi des lois qui précisent quelles sanctions on encourt si on fait un mauvais usage de ces armes-là. Les policiers sont également formés à utiliser les autres techniques pour arrêter un fait de violence. « 

Si Nahel avait été sur le territoire belge, le policier aurait-il eu le droit de tirer comme il l’a fait?

« N’ayant pas eu toute la vision de l’intervention et n’ayant pas une vision globale de ce qui se passait autour du policier à ce moment-là, c’est difficile de répondre. Si on prend le cas extrême où Nahel conduisait effectivement la voiture de manière dangereuse pour le public et qu’il mette en danger clairement l’intégrité physique d’usagers faibles (cyclistes, piétons), il est normal qu’on donne des injonctions en étant armé. Le véhicule est alors considéré comme une arme. Dans ce cas-là, on vise le conducteur car c’est lui qui gère le véhicule. Si le véhicule peut être utilisé comme une arme, la seule manière de stopper cette arme, c’est de toucher la personne qui le conduit. Mais c’est vraiment en cas de dernier recours. L’usage de l’arme ne se fera que si le conducteur appuie sur l’accélérateur et met directement en danger d’autres usagers. Si le policier avait été mis en danger pendant son intervention, que le démarrage du véhicule représentait un danger pour lui ou son collègue, l’usage de l’arme pourrait aussi être envisagé. Je dis pourrait, car il faut entrer dans les critères (conditions) de la légitime défense (quand on doit se défendre pour sauver sa vie).