Mohammed Lubbad, Oday Alajrami et Mohammed Al Hindi viennent de Gaza (Palestine, sur la côte à l’est de la Méditerranée). Depuis juillet 2018, ils vivent en Belgique. Ils veulent rester chez nous et espèrent recevoir la protection officielle de la Belgique.

Depuis fin juillet 2019, Mohammed Al Hindi habite dans un logement social (pour des personnes qui ont peu d’argent). Les deux autres sont toujours dans un centre d’accueil à Sainte-Ode (sud de la Belgique), avec environ 250 personnes de pays différents. Trois fois par semaine, ils font faire du sport à la cinquantaine d’enfants du centre. Et les enfants adorent!

Il faut dire que les jeunes hommes, en plus d’être des professeurs patients, sympas et encourageants, sont impressionnants. Ce sont des acrobates, qui font du parkour, un sport qui peut se pratiquer en rue. En gros, il s’agit de sauter d’un obstacle à l’autre en faisant des figures. Avec leur groupe, Free Run Gaza, ils ont même participé au programme Arab got talent, au Liban, en 2017!

Une activité interdite à Gaza

Tout a commencé en 2008, avec Mohammed Lubbad: «J’ai découvert le parkour grâce à “ Banlieue 13 ”, un film d’action». Mohammed a alors 18 ans. Il visionne des vidéos de parkour sur Internet et s’entraîne à sauter d’un endroit à un autre, à faire des figures acrobatiques…

Le futur instituteur crée même une école de parkour. Le groupe réunit jusqu’à 150 membres et l’école accueille un millier d’élèves de 8 à 24 ans, uniquement des garçons. «Pas mal de filles étaient intéressées mais elles ne pouvaient pas. C’est mal vu chez nous. C’était déjà très compliqué pour nous, de pouvoir pratiquer ce sport

Compliqué? « Le parkour est interdit par les autorités de Gaza, parce que c’est un sport venu de l’étranger. On était régulièrement convoqués par la police. On organisait donc notre école en cachette, on changeait d’endroit… Une fois, tandis qu’on filmait nos activités, on s’est fait tirer dessus. Mais on continuait parce qu’on aime ça. Et puis, il y a des talents. Nos vidéos sur Internet étaient appréciées. On recevait des invitations de l’étranger. Mais on ne pouvait pas y aller

TV et liberté

Finalement, huit membres de Free Run Gaza peuvent se rendre au Liban, pour l’émission Arab got talent, en 2017. Mais il est très difficile de sortir du territoire de la bande de Gaza, qui est entouré d’un mur et de barbelés surveillés par les armées israélienne et égyptienne. Le seul passage pour sortir de Gaza vers l’Égypte est très souvent fermé. «On a dû attendre sept jours à la frontière avant de pouvoir sortir.»

Arrivés au Liban, ils participent à l’émission… et décident de ne plus rentrer à Gaza. «On a trop souffert à Gaza, on était toujours menacés. Deux ans après notre départ, les menaces continuent sur nos familles et les gens du groupe qui sont toujours là-bas. Pourtant, à Gaza, l’école et le groupe n’existent plus.»

Ils sont maintenant quinze membres de Free Run Gaza à être dispersés dans plusieurs pays, Jordanie, Malaisie, Liban, Grèce, Belgique… Ils continuent à pratiquer le parkour.

Ici, on fait attention à nous

Oday sourit quand on souligne le danger: «C’est pas plus dangereux que ce qu’on a vécu à Gaza !» Il y a notamment une vidéo qui le montre sautant d’un immeuble à l’autre, de bâtiments complètement éventrés par la guerre. Inconscient et irréfléchi, Oday? Il a pourtant 25 ans, et un diplôme de droit en poche ! «À Gaza, le parkour, c’était le seul moyen de sortir l’énergie négative qu’on avait en nous, le stress, la pression. Maintenant, notre vision a changé. Le parkour, c’est notre passion mais, ici, on fait attention à notre vie. À Gaza, si quelqu’un tombait et décédait, on l’acceptait. De toute façon, s’il ne mourait pas comme ça, il risquait de mourir sous les balles israéliennes. Ici, on fait attention à nous. Peut-être que ça va être notre métier!»