Sur l’écran, une frimousse souriante et pétillante annonce fièrement : «J’ai 1 000 abonnés!» C’est Binti, 12 ans. Elle rêve de devenir une célèbre vloggeuse et elle se montre sous son meilleur jour sur sa chaîne YouTube. Mais derrière cette image pleine de légèreté, il y a une fille qui se cache de la police, avec son père. Ils sont sans-papiers (ils n’ont pas les autorisations officielles pour vivre en Belgique).

Frederike Migom, la réalisatrice du film, explique pourquoi elle a choisi de parler de ce sujet: «Il y a des enfants qui sont nés ici, qui grandissent ici, qui vont à l’école ici et qui peuvent être renvoyés dans le pays de leurs parents, un pays où ils ne sont jamais allés, juste parce qu’ils n’ont pas les papiers. C’est assez choquant, je trouve. J’ai travaillé dans une école où ça existait vraiment et j’ai eu l’envie de raconter ça du point de vue de l’enfant, ce qui se fait rarement.»

L’histoire démarre sur la situation de Binti et de son père… et puis on oublie presque qu’ils sont sans-papiers, car il se passe énormément de choses! «C’est voulu. Un enfant sans-papiers reste un enfant. Et je voulais montrer Binti comme une enfant qui rêve d’être vloggeuse plus que comme un enfant qui n’a pas de papiers. Je voulais créer des personnages très riches, avec plein de caractéristiques. Les gens qui sont sans-papiers sont plus que des personnes qui n’ont pas de papiers. »

Cela donne un film léger, vivant, touchant. Il y a du jeu, de la danse, de la musique, de l’humour…

Les rencontres enrichissent

Dans le film, Binti et son père font des rencontres. Mais ce ne sont pas nécessairement les autres qui vont aider les «pauvres» sans-papiers! En fait, tout le monde a des petits ou gros problèmes, et l’entraide s’organise dans toutes les directions, entre tous.

En plus de l’aide qui se démultiplie, il y a aussi les découvertes que tous les personnages font grâce aux rencontres. Une multitude de «cultures» se croisent: la poésie, les langues, la défense des okapis, la musique, la danse, la couture, la culture web… «Je voulais que tous les personnages soient égaux, qu’ils aient tous quelque chose à apporter autant que recevoir.» Du coup, les personnages ne sont pas réduits à leur situation de «Belge», «Congolais», «sans-papiers»… Comme dans la vraie vie, chacun a des talents, des traits de caractère, des passions qui le rendent unique.

En flamand et en français

Le film fait aussi se croiser les cultures… flamande et francophone! En effet, on passe d’une langue à l’autre, avec des sous-titres. Frederike Migom: « Moi, j’habite à Bruxelles et ça se passe comme ça. Pour les acteurs qui jouent Binti et son père, ça se passe comme ça aussi. Il y a en a un qui parle en français, l’autre qui répond en néerlandais. C’est normal, donc je voulais vraiment avoir ça dans mon film.»

Une fin un peu dure

Difficile de ne pas parler de la fin du film, qui est assez dure. «Oui, j’hésitais. Mais Baloji, qui joue le père de Binti, a vraiment vécu cette situation et il m’a dit qu’il fallait vraiment jouer ça comme ça. L’acteur qui jouait le rôle du policier est réellement policier et il a déjà été dans le cas aussi. Du coup, je les ai laissés jouer comme ça se passe vraiment. Même si c’est un peu dur ou violent. Mais heureusement, ça se finit bien!»