Trois classes partenaires nous ont envoyé des questions à poser à Fabien Vehlmann, le scénariste de la série BD Seuls.

Une partie de l’interview est publiée dans le JDE de ce 25 janvier. Voici d’autres questions-réponses.

Etes-vous uniquement scénariste ou vous arrive-t-il d’être illustrateur?

Je suis uniquement scénariste, mais il m’arrive de dessiner pour les dédicaces. Lorsqu’un lecteur me demande une dédicace, il est souvent timide. Quand je dessine, la parole est libérée, il commence plus facilement à me parler pendant que j’ai la tête baissée pour dessiner. Or, ce qui m’intéresse dans les dédicaces, c’est la rencontre, pouvoir se parler…

Fabien Vehlmann
Ce Français de Nantes est scénariste de BD.

Comment s’organise votre travail ?

Le matin, j’écris les pages qui ressembleront au scénario définitif. Il y a une page de scénario par page de l’album, et j’y dis le nombre de cases, avec le plus de descriptions possible.

Puis après-midi, je suis dans la rêverie, et je cherche de la documentation, je passe des coups de fil à des spécialistes pour un futur scénario. Je cherche des bonnes idées et des futurs éléments qui seront dans le scénario. J’essaie de m’y prendre à l’avance. Plus tôt on trouve des idées, plus on peut dormir dessus et le cerveau peut trouver plein de solutions. Si on s’y prend trop tard, le cerveau n’a pas le temps de traiter les informations pour m’aider à trouver comment finir mon histoire, par exemple. La solution viendra de mes réflexions mais aussi de mon inconscient que j’aurai nourri par mon travail pendant un certain temps.

Travaillez-vous tous les jours ?

Je travaillais tous les jours avant de rencontrer ma femme. Mais elle m’oblige à m’arrêter le week-end. Et elle a raison. Elle m’a fait comprendre qu’il était préférable de faire des pauses, de faire des choses en famille. Ça aide à avoir de nouvelles idées. Se reposer est important pour avoir des nouvelles idées et être plus productif.

Où puisez-vous votre imagination ? Vous inspirez-vous parfois de faits réels pour commencer votre BD ?

Je m’inspire de tout. Ce qui me guide, c’est la curiosité. Ça peut être des faits réels. Ou des éléments d’une autre fiction mais sans plagier, sans copier. Ou je m’inspire de ce qu’on appelle des essais, des réflexions sur un sujet par des personnes qui ont étudié une question. Par exemple, un essai sur la place des femmes dans la société ou sur la violence dans la démocratie. Je parle aussi à des gens, qui me parlent de leur vie, de leurs rêves. Et au bout d’un moment, mon inconscient va faire son miel de tous ces éléments.

Avez-vous inventé les noms ou est-ce une inspiration venant de vos connaissances ?

Dans Seuls, j’ai choisi des noms existants. Sauf pour Dodji. Ça vient d’un nom africain qui se dit Dodji mais qui s’écrit Dodzi. C’est un prénom souvent donné aux enfants orphelins et qui veut dire ‘sois courageux’. On a voulu le reprendre mais on a changé l’orthographe pour qu’il soit prononcé comme en Afrique.

Lisez-vous des BD de ce genre venant d’autres auteurs ?

Je lis plein de BD. Mais une règle d’or, c’est d’éviter de lire les auteurs du même domaine. Si on écrit des romans policiers, il ne faut surtout pas lire que des policiers. Je recommande d’avoir une curiosité plus large. Sinon, on tourne en boucle avec les idées de ce domaine. Si vous allez dans une bibliothèque, prenez un livre dont vous ne savez rien, même si c’est sur un sujet qui vous est inconnu. Juste pour la surprise de découvrir quelque chose que vous ne connaissez pas du tout. C’est une très bonne idée pour développer son imaginaire !

Pourquoi avoir choisi le nom « Seuls » ?

Seuls parce que toute personne naît, vit et meurt seule. On est chacun seul à expérimenter. Si je me coupe au doigt, je suis le seul à ressentir la douleur. On est tous seuls, à vivre nos vies singulières, tous ensemble.

Combien de tomes il y aura, en tout, dans la série ?

On a commencé en 2006, on n’est pas très rapides. On espère qu’il y en aura 22 si le succès commercial le permet. On s’est dit que ça serait assez long pour pouvoir raconter une vraie histoire, assez longue.