Des infirmiers et infirmières ont annoncé des actions de protestation tous les mardis. Pour comprendre ce qui se passe, nous avons rencontré Isabelle, qui travaille depuis 24 ans au service des urgences du CHR (centre hospitalier régional) de Namur.

Isabelle trouve que les changements dans son travail ont été «énormes» depuis le début de sa carrière (période de vie professionnelle): «La charge de travail est de plus en plus lourde, pour plusieurs raisons. Parce que la population vieillit. Parce que les médecins généralistes sont de moins en moins disponibles, parce qu’ils sont eux aussi trop peu nombreux. Parce que les gens sortent de plus en plus tôt de l’hôpital, et donc ils reviennent plus vite parce que ça ne va pas… Encore ce matin, un patient qui était sorti il y a cinq jours est revenu parce que ça ne va pas

Il y a plus de travail et trop peu d’infirmiers. «Quand on reçoit notre horaire du mois, explique Isabelle, on démarre déjà avec dix jours où il manque quelqu’un dans l’horaire. À cela viennent s’ajouter des infirmiers qui tombent malades…»

Ce rythme de travail est difficile à supporter pour beaucoup d’infirmiers, qui voient aussi des conséquences pour les malades. Isabelle: «Il y a le stress, la pression mais aussi la crainte de faire une erreur, de ne pas voir un problème chez quelqu’un. Et puis on a une énorme frustration de faire nos actes médicaux machinalement, à la chaîne, sans prendre le temps de discuter avec les patients. Un jour, j’ai accompagné une dame qui devait subir un examen médical difficile et je devais rester près d’elle pour assister le médecin. J’ai tenu la main de la patiente pendant l’examen et elle m’a bien remerciée trois fois. Je me suis dit: bêtement tenir la main, c’est important, parfois, et on ne le fait jamais parce qu’on n’a pas le temps.»

On manque d’infirmiers

Engager des infirmiers supplémentaires? Les hôpitaux n’ont pas les finances, et doivent respecter un cadre légal (des lois).

Et puis, ce n’est pas toujours aisé de trouver des infirmiers. Ce métier est en pénurie (on en manque). Les horaires compliqués, le stress, les conditions de travail font que moins de jeunes choisissent cette profession. De plus, les études ont été allongées d’un an, ce qui fait que, cette année, aucun nouvel infirmier ne sera diplômé. Enfin, il n’est pas rare que des infirmiers changent de service ou de métier: «Ça arrive régulièrement, confirme Isabelle. Ils sont saturés de ce rythme. Souvent, ils changent de service, mais il y en a qui vont vers un autre type de travail, avec moins de stress, des horaires moins compliqués, sans devoir travailler le week-end ou des jours fériés… Moi, je me suis déjà posé la question mais je ne sais pas où j’irais parce que j’aime vraiment mon travail aux urgences. Par contre, j’ai travaillé 24 ans de nuit et je viens de passer à un horaire de jour parce que je n’arrivais plus à dormir la journée. Je reprends goût au travail depuis. Il faut dire que je suis à mi-temps, aussi. À temps plein, je n’aurais sans doute pas tenu.»

Vous pouvez lire un autre témoignage, différent mais tout aussi intéressant, sur notre site Internet.