Pour nous, l’adolescence est une évidence. On sait qu’entre 11-12 ans et 18-20 ans, en gros, on est ados. Mais ça n’a pas toujours été le cas! Ce qu’on appelle l’adolescence n’a pas toujours existé et, encore aujourd’hui, dans certaines sociétés (groupes de population), elle n’existe pas.

Martine Stassart est psychologue (quelqu’un qui aide à se sentir mieux quand on est mal dans sa peau, qu’on a vécu des choses difficiles…). Elle s’est beaucoup intéressée à l’adolescence ici et ailleurs. Elle nous confirme que cette période entre l’enfance et l’âge adulte n’a pas toujours été identifiée et réfléchie par les psychologues, sociologues (qui étudient les sociétés)…: «C’est assez récent, que l’on s’intéresse à l’adolescence dans nos sociétés occidentales (Amérique du Nord, Europe). Je dirais que ça date des années 1960-1970

Avant, le passage à l’âge adulte était marqué par des règles et une ritualisation (des étapes, cérémonies, gestes…): on devait participer à des cérémonies religieuses comme la communion que l’on faisait vers 12 ans, on devait se fiancer puis se marier, on travaillait plus tôt qu’aujourd’hui (parfois à 15 ans), les garçons devaient accomplir le service militaire qui faisait d’eux «des hommes»… L’enfant qui grandissait suivait les étapes imposées par la société et devenait l’homme ou la femme que le groupe attendait.

Des rites imposés

Martine Stassart explique: «C’est encore le cas aujourd’hui dans les sociétés traditionnelles. Ces sociétés vivent selon leurs traditions, leurs coutumes, leurs croyances, leurs valeurs… Elles ont peu de contacts avec les autres sociétés. Là, les jeunes qui sortent de l’enfance doivent vivre des rites de passage: on les exclut, en les rassemblant dans un endroit reclus (fermé) hors de la communauté. On leur enseigne les croyances, les traditions. On leur fait passer des épreuves violentes, pour intégrer la violence du monde; ils doivent combattre, par exemple. Les jeunes reçoivent des marques sur le corps, pour montrer le passage à l’âge adulte…» Toute la communauté se rassemble en général lors d’une cérémonie importante pour accueillir le jeune devenu adulte.

Choisir qui on sera, c’est compliqué

« Toutes les questions que nos jeunes se posent, les enfants des sociétés traditionnelles ne se les posent pas puisqu’ils doivent se soumettre aux normes (règles) de leur société, de leur communauté. Chez nous, la plupart des normes sont estompées (gommées), le jeune est plus libre de devenir l’adulte qu’il veut. Il y a moins d’interdits, de limites, d’obligations. Du coup, c’est plus compliqué, plus long, ça fait peur, et le jeune doit faire ce travail intérieur seul, même s’il est soutenu par les parents, la famille, l’entourage…»