C’est un lieu secret, quelque part dans Bruxelles. Seules des femmes y entrent. Dans la salle commune, certaines papotent dans un divan, se reposent ou sont penchées sur leur téléphone portable. Plus loin, une fille passe de la cuisine à la salle à manger avec une assiette fumante. Des silhouettes sortent des douches et se coiffent devant les miroirs. Une femme nous croise, tout sourire, avec un balai: «Hello». Dans un autre local, un groupe suit des cours de français. L’ambiance est paisible. Et ça, c’est un petit miracle, un coup de magie, grâce à… 250 bénévoles (personnes qui donnent de leur temps sans se faire payer).

Le stress et les dangers

Depuis un peu plus d’un an, ce lieu accueille en permanence une cinquantaine de filles et de femmes qui ont fui leur pays et qui sont sur la route de l’exil (de la vie loin de chez elles).

Delphine nous accueille dans cette Sister’s house (la maison de la sœur): «Beaucoup de filles passent des années sur la route pour arriver ici. Elles vivent des choses très dures. Elles ont l’idée d’aller en Angleterre parce qu’on leur a dit que c’était facile et rapide d’avoir des papiers là-bas (papiers officiels pour être autorisé à vivre dans un pays). Mais sur le trajet, elles vivent sans cesse dans le danger, notamment des violences de genre (en tant que femmes). Or, c’est impossible de se projeter et de réfléchir à des choix de vie quand on se sent en insécurité.»

Ici, les filles peuvent dormir, prendre une douche, manger, laver leurs vêtements… en sécurité. «Elles se détendent, ici, car elles sont entre femmes. Même les bénévoles qui gèrent la Sister’s house sont des femmes. Avec d’autres organisations et associations, on essaie de répondre à leurs besoins médicaux, et de les informer sur leurs droits, sur l’asile, les procédures… Quand elles se sentent mieux, elles peuvent prendre le temps de réfléchir sur la suite de leur parcours.»

Reprendre sa vie en main

À la Sister’s house, il y a en permanence au moins deux bénévoles. Elles gèrent l’endroit et proposent des activités: dessin, couture, cours de français ou d’anglais…

Elles impliquent aussi les femmes: chaque soir, tout le monde se réunit et parle du fonctionnement de l’endroit, des besoins, envies… Elles décident ensuite qui fera quoi le lendemain: il y aura une équipe repas du soir, une équipe nettoyage… « Tout est pensé pour qu’elles s’approprient le lieu, qu’elles en prennent soin, mais aussi qu’elles agissent, qu’elles reprennent du pouvoir de décision dans leur vie», explique Delphine.

La durée des séjours varie d’une personne à l’autre. Certaines femmes continuent à essayer d’aller en Angleterre, d’autres demandent l’asile (le droit de vivre protégée) en Belgique, ou vont ailleurs…

Les bénévoles, elles, continuent à récolter de la nourriture et des produits sanitaires (savons, shampoings…), à organiser des activités, à coordonner le travail avec les autres associations et organisations, et à veiller sur leurs petites sœurs d’humanité…

En savoir plus

La Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés gère également cinq autres hébergements collectifs pour des hommes à Bruxelles et vingt-quatre en Wallonie. Un lieu accueille aussi une dizaine de femmes les week-ends à Huy.

Cette Plateforme BXLRefugees existe depuis 2015. Elle organise aussi de l’hébergement de migrants dans des familles.

Tout fonctionne grâce à la générosité: bâtiments et équipements, nourriture et besoins matériels, soins, aide, soutien, organisation…