Arnould Massart est musicien. Dans les années 1990, il a découvert la thérapie (les soins) par les sons.

La musique et les sons peuvent avoir un effet sur notre santé, notre bien-être (le fait de se sentir bien)?

Oui, sur nous, tout simplement. Sur notre humeur, notre tonus corporel, notre stress…

Comment expliquer cela?

Il y a notamment l’effet d’entraînement. Prenons un exemple. Si vous arrivez chez moi très stressée et j’ai envie de vous calmer en vous parlant. Probablement que vous parlez vite. Ce que je dois faire, moi, c’est d’abord rencontrer cet état chez vous, donc parler vite. Et petit à petit, je vais ralentir ma façon de parler. Ça va vous inviter à ralentir aussi, ce qui va avoir un effet sur votre système nerveux (respiration, tension, rythme cardiaque…). Par contre, si vous arrivez stressée et que je vous mets de la musique relaxante, c’est pas sûr que ça marche, parce que vous n’êtes pas prête à entendre ce genre de truc-là.

Vous avez aussi d’autres phénomènes comme le toning et le humming. Vous faites un son «aaaa» ou «oooo» ou «mmmm» très long. La respiration va ralentir automatiquement. Votre mental va penser au son et oublier le reste. Vous vibrez et vous vous faites un massage intérieur, même si vous ne le sentez pas, c’est réel. Et puis il y a un côté émotionnel: on ressent des choses différentes si on fait un son ou un autre. Essayez, vous verrez. Et si vous fermez les yeux, vous verrez peut-être des couleurs différentes selon les sons que vous choisissez. Si on fait ça un peu tous les jours, on peut observer que notre rapport au monde est un peu différent, on est plus posé, plus soi-même…

Si on a du mal à se concentrer, par exemple en classe, la musique peut être utile?

Oui. Aux États-Unis, ils ont fait des expériences dans des écoles avec des enfants hyperactifs. Ils ont installé des sortes de cabines, comme les anciennes cabines téléphoniques, avec un casque à l’intérieur. L’enfant qui sent qu’il a besoin de bouger a le droit d’aller dans une de ces cabines et de choisir sa musique. Le fait d’écouter une musique nerveuse va lui donner les stimulations dont il a besoin. Et après 5-10 minutes, il peut retourner s’asseoir et il est calmé, apaisé.

Et cela, même s’il n’a pas bougé, couru, sauté, dansé?

Oui. On s’est aperçu que, quand les gens écoutent du rythme, les zones du cerveau qui sont actives sont celles du mouvement, comme si les gens étaient actifs, alors qu’ils ne bougent pas.

Faire de la musique, chanter, danser…

Pratiquer la musique peut nous aider aussi?

On a remarqué que, pour un certain nombre d’enfants qui ont des difficultés d’apprentissage, le fait d’apprendre un instrument peut les aider dans leurs tâches scolaires. Évidemment, il faut qu’ils aiment bien, et que l’apprentissage se passe dans de bonnes conditions.

Mais déjà, simplement, faire du rythme ou du chant ensemble en classe, par exemple, ça rapproche les élèves. Bien sûr, ça dépend comment. Si les élèves se sentent obligés de chanter un truc qu’ils n’aiment pas, ça ne va pas marcher. Mais s’ils chantent un truc qu’ils aiment bien, tapent dans les mains…, peut-être que ça va faire diminuer les conflits et améliorer les collaborations.

Est-ce que ça a un effet sur la concentration?

Oui, mais chacun a des besoins différents pour se concentrer. Certains auront besoin de rythme, d’autres de musique calme, ou encore de silence complet.

Par contre, je pourrais imaginer qu’il y ait cinq minutes pour écouter ou même danser, chanter ensemble en classe. Après, il faut ramener au calme avec d’autres musiques qui vont ralentir. On peut aussi imaginer qu’il y ait une musique qui invite à se calmer quand on rentre de la récréation.

Les rythmes peuvent avoir d’autres effets?

On a découvert qu’il y a un lien entre les aptitudes rythmiques (le fait de pouvoir entendre et frapper des rythmes) et la dyslexie. On pense que travailler le rythme pourrait peut-être aider à atténuer les problèmes de dyslexie.

On utilise la musique pour soigner, c’est la musicothérapie. Elle est indiquée pour quels genres de problèmes?

Le stress avant tout. Ça peut aussi servir à entrer en contact avec soi, avec ses émotions. Il y a des gens qui ont une colère générale intérieure et qui ne le savent pas, et la musique peut aider à faire venir les mots et à décharger cette colère. La musique peut aussi aider à lutter contre la douleur, en «distrayant» le cerveau, en l’orientant vers la musique plutôt que vers la douleur.

La musique peut aussi aider à se stimuler, mais c’est pas de la musicothérapie, c’est juste de la musique: pensez aux gens qui font du jogging avec un casque sur les oreilles ou aux salles de sport. Essayez toujours d’éteindre la musique dans une salle de fitness, vous verrez l’effet!