Un homme entre dans la pièce où se trouvent les élèves de 5e et 6e primaires de l’Institut Sainte-Marie de Bouillon (province de Luxembourg). Il est paniqué. Il appelle à l’aide, il crie, mais personne ne le comprend. Il ne parle pas notre langue. On se sent impuissants. Certains rigolent parce qu’ils sont gênés. «Cette langue, inconnue, se dresse comme une frontière entre lui et nous », explique Bénédicte Helsemans, la coordinatrice du projet «Les frontières en mouvement».

Des mois de préparation

En février 2019, un petit groupe de personnes originaires de différentes cultures se sont réunies pour monter ce projet. Le résultat? Un spectacle de 30 minutes qui illustre différents niveaux de frontières: celles qui existent en nous et qui nous empêchent de nous épanouir, celles qui se glissent entre les personnes, celles qui naissent face au handicap, celles liées aux langues ou encore les frontières terrestres, qui nous empêchent de circuler librement sur la Terre. Sur scène, les acteurs ne parlent pas. En plusieurs saynètes, avec ou sans masque mais toujours avec émotion, ils rendent les frontières visibles. Mais ils montrent également comment les faire tomber. «C’est un spectacle non verbal, poursuit Bénédicte Helsemans. Il est donc accessible à tous. Et chacun le comprend en fonction de son imaginaire, de son vécu.»

«C’est plus gai ensemble»

Une fois le spectacle terminé, les spectateurs deviennent aussi des acteurs. Ensemble, ils vivent les frontières et essayent de les dépasser. Comment se sent-on lorsque l’on est isolé dans une boîte? «C’est plus gai ensemble», entend-on dans les rangs. À quelles difficultés sont confrontés les porteurs de handicap? «Se déplacer, faire ses courses, ça doit être dur. Il faut pouvoir demander de l’aide.» Pourquoi certaines personnes qui quittent leur pays ne sont-elles pas bien accueillies ailleurs? «On est tous des humains. Ceux qui ne veulent pas accueillir les migrants ne sont pas sympas ». Aux côtés d’Anita, Jérôme, Djamila et des autres acteurs, les élèves partagent leur vision de la différence. «Elle nous enrichit, affirme Bénédicte Helsemans. Quand nous sommes dans un groupe, celui-ci fonctionne grâce aux spécificités (aux particularités) de chacun. En tendant la main vers l’autre,on peut faire tomber les frontières, et partager sans limite. »