Fatima nous ouvre la porte avec un grand sourire. Tout le monde a retiré ses chaussures à l’entrée. Louise est déjà arrivée avec ses deux enfants, Achille, 10 ans, et Frida, 6 ans. Près d’eux, Haitem, 10 ans, et sa cousine Fatima sont en train de faire connaissance. Le chef de famille, Mohammed, nous présente le reste de la famille…

Des jeunes arrivent à leur tour, visiblement par surprise. Fatima les fait asseoir: «Ah, vous venez manger avec nous? Bienvenue! On va être nombreux!». Puis elle demande: «C’est à quelle heure, ce soir?» Mohammed allume la TV sur une chaîne arabe. Ça y est, l’appel à la prière est lancé. Nos hôtes prennent une datte et la mangent pour rompre le jeûne (jeûner, c’est ne pas manger). Ils n’ont plus rien mangé ni bu depuis l’heure du lever du soleil, à 3 h du matin! Certains de nos hôtes montent discrètement faire la prière du Maghreb (c’est le nom de la prière du soir). Et on mange. Autour des deux tables, on est 14!

«Mmmmmm, c’est trop bon! », s’exclame Frida.

Louise pose des questions: qui fait le ramadan dans la famille? Comment? Achille écoute. À l’école, il a beaucoup d’amis musulmans. Il a remarqué des différences et a envie de comprendre.

Fatima, la maman, nous explique: «Dans certaines familles, les enfants font le ramadan le week-end. Les enfants sont très contents de le faire. Moi, je les laisse tranquilles jusque 13-14 ans. C’est quand même fatigant. Pendant un mois, on reste réveillés jusque 1 h du matin puis on mange et on boit entre 2 h 30 et 3 h, juste avant le lever du soleil. Et puis on dort un peu avant de se lever pour aller au travail ou à l’école. Et on attend l’heure du coucher du soleil pour de nouveau boire et manger.»

Pourquoi?

Mais pourquoi font-ils le ramadan? «C’est un des cinq piliers (les cinq devoirs fondamentaux, les bases) de l’islam, répond Fatima. Et c’est pour se mettre à la place de celui qui n’a pas de quoi manger, et mieux le comprendre. On donne plus d’argent pour les pauvres pendant le ramadan parce qu’on ressent plus ce qu’ils sentent. Bien sûr, on doit toujours aider son prochain. Notre porte est ouverte à celui qui veut manger, mais encore plus pendant le ramadan. Les jeunes qui sont là, par exemple, on ne savait pas qu’ils allaient venir. Mais c’est normal de leur donner à manger. Le ramadan c’est un mois sacré pour nous. C’est une richesse de l’esprit. Et on nettoie notre corps

En plus du jeûne, bien sûr, il y a les prières. Mohammed nous les détaille. Il nous explique qu’il y en aura encore une ce soir, la Isha, vers 23 h 30, qui est suivie par le Tarawih, prière spéciale du ramadan.

Entre-temps, Achille a disparu… Il est en train de jouer à l’étage avec Haitem. «Beaucoup de gens pensent que jeûner, c’est difficile, remarque Fatima en nous servant un délicieux thé à la menthe. Mais le ramadan, c’est aussi une belle période. On s’invite, on partage, on fait des repas de fête, on est en famille…» Mohammed ajoute: «Rester sans boire ni manger, c’est pas difficile si on a la volonté et la foi».

Les jeunes invités surprises se lèvent et s’en vont: «Merci beaucoup, hein, vous nous avez sauvés!» disent-ils en riant. «De rien, répond Fatima, vous venez manger quand vous voulez