Titeuf, le livre d’or, Zep, Glénat.

Il y a Nadia, dont Titeuf est amoureux. Mais c’est Thérèse qui vous touche, c’est juste ?

 « Oui, j’aime beaucoup ce personnage de Thérèse car elle est à contre courant de l’enfance d’aujourd’hui qui subit une pression énorme par rapport aux réseaux sociaux, à être le/la populaire de l’école… Elle se fiche de tout cela. Aujourd’hui, dans la cour, il faut être au courant des tendances Tik Tok. Quelqu’un qui est déconnecté par rapport à ça est considéré comme un oiseau bizarre. Thérèse est tellement déconnectée qu’elle devient géniale: elle fait sa vie. Des enfants comme Thérèse sont souvent des enfants solides car ils ont leur propre monde, leurs propres valeurs. Je trouve ça admirables ces personnages. L’enfance, c’est un âge où on a envie que les gens soient normaux ou bizarres. On n’a pas tellement de nuances. Quelqu’un qui est normal, c’est quelqu’un qui est comme vous et quelqu’un qui est bizarre, c’est qu’il ne fait pas pareil.  Thérèse n’a pas envie de changer, même si vous le lui dites. C’est génial, car cela montre autre chose et ça ouvre l’esprit. Je dis toute ma tendresse pour ces enfants qui sont dans la lune, un peu déconnectés.

Titeuf, le livre d’or, Zep, Glénat.

Titeuf, c’est aussi le célèbre Guide du Zizi sexuel.

Vous dites: l’humour est un kit de survie.

« Dès le départ, Titeuf, je voulais que ce soit une bande dessinée réaliste.  C’est-à-dire pas que des trucs rigolos, des moments de détresse comme ne pas être invité à un anniversaire alors que tous nos copains le sont, d’être amoureux de quelqu’un qui ne nous voit même pas, d’essayer tant bien que mal de réussir à l’école mais de ne pas y arriver, d’être un peu moins apprécié dans la famille parce que l’on est un peu moins brillant… Je trouve que toutes ces petites tragédies de l’enfance, elles ont de l’importance et elles vont faire de nous l’adulte que l’on sera plus tard.

Et je trouve que l’humour permet de traverser ces choses-là. L’humour, c’est déjà quelque chose que j’avais quand j’étais enfant. Je me rappelle que je racontais à des copains en bande dessinée, des petites histoires désastreuses du quotidien. Et j’en faisais quelque chose de drôle et ça les faisait rire. Notre quotidien catastrophique les faisait rire ! Et je me suis dit à cet âge-là : mais c’est génial ! Parfois ces enfants qui me faisaient peur car ils étaient plus grands, plus violents et qu’ils allaient me taper dessus… tout d’un coup, ils riaient !

Faire ça, c’est une manière de survivre, de traverser cette enfance qui est longue. Ce sont des années de traversée, où il y a des choses super et des choses auxquelles on ne peut pas échapper. Si par malheur, dans la classe vous êtes celui qu’on a décidé de choisir comme tête de turc… Heureusement, on sait que cela ne dure pas toute la vie l’enfance… Mais le temps que ça dure, c’est très pénible. Et si vous êtes l’enfant qui déménage et qui va arriver dans un endroit où il ne connaît personne. Et que vos parents disent : mais c’est super, tu vas te faire des copains ! C’est dur ! Si votre petite amoureuse déménage à 10 km. Vous vous dites que vous ne la verrez plus jamais. Ce sont toutes des choses que l’on traverse en étant enfant. On n’a pas de prises. Les adultes décident et disent  :  à partir de maintenant, c’est comme ça, tu vas aller là, tu vas changer d’école… Il faut s’adapter à tout cela et je trouve que l’humour, en tout cas pour moi, ça a été ma manière de pouvoir vivre tout ça, sans que ce soit insurmontable. »

Titeuf, c’est une série qui comptabilise 20 millions d’albums vendus

Y a-t-il une communauté Titeuf ? 

« Elle change au fil du temps. Aujourd’hui c’est sur les réseaux, sur FB… et aussi en dédicaces. Les enfants m’apportent un dessin. Les 10 premières années, il y a eu un échange assez continu avec les lecteurs de Titeuf qui m’envoyaient toutes sortes de choses très marrantes, très touchantes. Cela m’a nourri. Pas vraiment pour faire des histoires mais ça m’a donné une reconnaissance.  Les enfants d’aujourd’hui n’envoient plus de lettres.

Par ailleurs, Titeuf est souvent sollicité par des associations pour être leur image, pour attirer l’attention sur des sujets qui touchent l’enfance. Cela peut être l’environnement, leur harcèlement scolaire, le racket, les prédateurs sexuels… Souvent des choses assez dures. J’aime bien aussi traiter ces sujets car ils font partie du quotidien des enfants. »

Parmi les invités surprises de cet album Titeuf, le livre d’or, il y a ce message touchant de Bigflo & Oli.