Connais-tu Vladimir Pletser ? Ce monsieur est un passionné de l’espace. Il a travaillé pendant 30 ans pour l’Agence spatiale européenne (ESA). Il a fabriqué des outils pour les recherches dans l’espace. Récemment, il a mené des recherches pour étudier le cœur, le cancer et les os en impesanteur.

Être en impesanteur

Pour bien comprendre l’impesanteur (ou l’apesanteur), il faut comprendre la pesanteur.

La Terre exerce une force sur tout ce qui se trouve autour d’elle. Cette force d’attraction, nous ne la sentons pas car nous y sommes habitués. Mais, sans elle, nos pieds ne resteraient pas au sol ! Cette force est appelée la pesanteur. Dans l’espace, quand des astronautes sont en orbite (qu’ils tournent en rond) autour de la Terre, ils restent attirés par la Terre mais ils ne ressentent presque plus la pesanteur, car l’engin dans lequel ils se trouvent tourne à une vitesse de +/- 28 000 km/h ! Les effets de la pesanteur diminuent très fort. Les corps donnent l’impression de flotter. Dans l’espace, on peut donc dire qu’il y a une pesanteur réduite, on l’appelle l’impesanteur.

Mais pour faire ses expérimentations, Vladimir Pletser ne s’est pas rendu dans l’espace. Il a fait ses recherches lors de vols un peu particuliers qui vont lui permettre de se rapprocher le plus possible de l’état d’impesanteur. C’est ce qu’on appelle des vols paraboliques.

Un vol parabolique, c’est quoi ?

Un vol parabolique, c’est un moyen de créer, avec un avion, une situation de micropesanteur (avec une pesanteur très réduite) pendant quelques secondes. Mais comment fait-on ça? Premièrement, l’avion va augmenter son altitude (sa hauteur par rapport à la mer) et sa vitesse. Durant cette phase, le poids des passagers augmente, car ils sont en hypergravité, la Terre les attire. « Donc, moi qui pèse normalement 80 kilos sur Terre, je vais peser, pendant deux à trois secondes, à peu près 240 à 320 kilos » , explique Vladimir Pletser.

« Une fois cette accélération faite, on rentre dans la parabole. Une parabole, c’est une courbe qui ressemble un peu à un dos de chameau. C’est la phase d’impesanteur, la zéro g. Le poids est égal à zéro dans la cabine de l’avion, parce qu’on est en chute libre, on tombe à la même vitesse que l’avion. Si on n’était pas attaché, on volerait. C’est vraiment très chouette comme sensation. » Cette étape dure une vingtaine de secondes dans un avion de ligne (comme ceux que l’on prend pour voyager). Ensuite, l’avion redescend et on peut recommencer plusieurs fois la même opération.

Les vols paraboliques permettent de se rapprocher de l’état d’impesanteur. – AirzéroG

Vladimir Pletser ne fait pas toutes ses expériences à bord d’un avion de ligne. Pour les dernières, Vladimir Pletser est monté dans un planeur. Il nous explique: « Il faut d’abord bien comprendre qu’il n’y a pas de moteur sur un planeur. Donc, pour décoller, le planeur est tiré par un avion tracteur qui vous tire jusqu’à une certaine altitude. On commence à 1000 mètres d’altitude. Une fois arrivé à cette altitude, on retire les câbles de l’avion tracteur et on est totalement indépendant (on peut voler seul). » Ensuite, le principe est à peu près le même que pour un avion de ligne. L’état d’impesanteur dure entre cinq et six secondes dans un planeur. « Le 4 avril, nous avons fait trois vols. Le premier vol, on a fait dix paraboles. Le deuxième vol, treize paraboles et le dernier, dix paraboles. »

Le planeur n’a pas de moteur, il a donc dû être tiré par un avion tracteur pour décoller. – Copyright LIDE.space

C’est la LIDE, une asbl créée par d’anciens étudiants de l’UCLouvain en 2020, qui a organisé ces vols en microgravité à Saint-Hubert le 4 avril. L’asbl rend accessible ce type de vol pour les recherches.

Le cancer, le cœur et les os : études en impesanteur

Vladimir Pletser participe à une étude sur les tumeurs cancéreuses, des grosseurs anormales sur le corps ou les organes. Est-ce qu’elles arrêtent de grandir en absence de gravité ou vont-elles au contraire se multiplier ? Pour cette expérience, l’ingénieur a emporté des cellules saines et d’autres cancéreuses pour ses vols paraboliques. « Le 4 avril, nous avons surtout testé l’aspect logistique, c’est-à-dire, l’ensemble des opérations qu’il faut réaliser pour amener ces échantillons dans l’espace, les garder à la bonne température, par exemple. » Les tumeurs seront à nouveau étudiées en 2024 ou en 2025, cette fois, dans l’espace.

De la même manière, Vladimir Pletser collecte des données sur le cœur. L’ingénieur a porté un dispositif pour mesurer les signaux du cœur lors du vol.

Une recherche sur les fractures des os a aussi été réalisée le 4 avril. « On mesure la force de collage de nouveaux tissus osseux dans un os vivant après une fracture. » Cette expérience sera refaite dans trois ou quatre mois.

Les expériences sur le corps humain sont très passionnantes pour l’ingénieur. Mais Vladimir Pletser n’a jamais étudié la médecine. Ses nombreuses expériences à bord des vols paraboliques l’ont toutefois amené à comprendre comment fonctionne le corps humain. « On avait beaucoup d’expériences des sciences de la vie, c’est-à-dire, la physiologie humaine, la biologie, etc. Donc j’ai dû m’informer et apprendre un peu sur le tas. »

L’ensemble des expériences vont, à terme, permettre de comprendre comment les cellules cancéreuses, le cœur et les os se comportent en impesanteur, mais aussi relever d’autres questions. « On n’est pas encore au moment de lancer des malades atteints du cancer dans l’espace. Je ne crois pas que ce sera une solution. Mais c’est surtout une recherche fondamentale pour comprendre au niveau du tissu cellulaire comment la prolifération (la multiplication des cellules) se ferait. »