Charles Kerangoff a acheté la parfumerie Guy Delforge il y a cinq ans. Depuis, il crée des parfums. « J’ai un très bon nez, explique-t-il. Il paraît que je sens deux fois et demi ce que les autres sentent. Je m’en suis rendu compte à la fin de mon adolescence, quand j’ai vu que je ne supportais pas les mauvaises odeurs, au point que parfois, je tombe dans les pommes. »
De cet odorat très sensible, Charles Kerangoff a fait un atout. Il est devenu créateur de parfum. « On appelle les gens comme moi des ‘nez’, dit-il à Louise et Alice. C’est bizarre. On ne réduit pas un pianiste à sa main, par exemple ! »

Fabriquer du parfum, c’est comme suivre une recette de cuisine

Pour produire un parfum, c’est comme si on suivait une recette de cuisine. « Les ingrédients sont simples : des huiles essentielles qu’on mélange avec de l’alcool et de l’eau. » Des huiles essentielles, ce sont des extraits liquides et aromatiques d’une matière (fleur, fruit, matière naturelle…).
Charles Kerangoff montre aux deux filles des flacons géants en verre : « Ça, c’est des touries de 10 litres. Je fais 100 flacons avec ça. Le parfum que je vends bien, je vais le mettre dans un 25 litres. »
« Quand je fabrique un parfum, je mélange mes huiles essentielles. Par exemple, un peu de rose, de lavande et de bois. Mais dans des proportions précises, au quart de goutte près. Je fais attention ! »
« Ensuite, je mets 15 % de ce mélange d’huiles essentielles, de l’alcool et de l’eau distillée et je remplis cette tourie. Elle va reposer 3 à 13 mois dans les souterrains. »

À l’abri de la lumière et de la chaleur

Alice et Louise le suivent. Nous sommes à 13 m sous terre, dans un souterrain qui a 500 ans ! Mais pourquoi faire reposer les parfums ici ? « Les deux ennemis du parfum, c’est la lumière et les écarts de températures, surtout la chaleur. D’ailleurs, rit Charles Kerangoff, le pire endroit pour votre flacon de parfum à la maison, c’est la place où tout le monde le met : à la salle de bains, en pleine lumière, où les températures montent quand on prend sa douche avant de redescendre. »
Mais revenons à nos touries. Pendant que le parfum repose, des dépôts se forment au fond. « Je ne peux pas laisser cela. Le parfum deviendrait trouble si on le secoue et puis, ça pourrait boucher le petit tube du pulvérisateur. Donc, je vais le filtrer avant de le mettre en flacon. »


On remonte à l’atelier, où Jean-Jacques est justement en train de remplir des flacons et de poser les pulvérisateurs au fur et à mesure dessus. « Il faut aller vite pour ne pas perdre de senteur, explique Charles Kerangoff. Ensuite, le flacon est scellé. On vérifie que le pulvérisateur fonctionne bien. On met le cache-pompe et le bouchon, et il reste à coller l’étiquette avant de mettre le flacon en boîte. Il peut enfin être vendu dans la boutique, ou via Internet ! »

Comment créer un nouveau parfum ?

« J’ai plein d’huiles essentielles. Chaque matin, je fais des mélanges. Je mets une goutte de différentes huiles essentielles sur des tigettes que j’agite devant moi. Au bout de 15 minutes, mon nez est plein et je dois arrêter. Je note bien ce que j’ai fait et toute la journée, je vais penser à ce que je vais faire le lendemain. J’ai plein de cases dans la tête et je me souviens des odeurs, des associations… »

Charles Kerangoff agite des tigettes sur lesquelles il a versé une goutte d’huile essentielle.

« Après un à deux mois, je commence à mettre de l’alcool et à affiner les proportions. Au bout de 3-6 mois, j’arrête et je fais tester à mes collègues. S’ils trouvent que c’est bon et que c’est quelque chose qu’on n’a pas encore, on fabrique pour le vendre. »

https://www.delforge.com/