Paul est super fier de ses baskets. Mais la concierge de l’école murmure que «LA» marque, c’est (juste) du marketing !

Les garçons sont surpris : c’est quoi le marketing ?

Démarre une discussion entre eux, qui va les emmener au cœur de questions importantes : C’est quoi la concurrence ? Pourquoi les marques sont-elles nées ? Une personne peut-elle être une marque ? Pourquoi certaines images leur semblent-elles « cool » alors que d’autres leur paraissent plutôt « écolos » ou « sportives »?…

Les enfants comprennent petit à petit que le marketing essaie d’influencer positivement l’image d’une marque.

Dans cet album, tout est concret, avec des dessins colorés, des explications claires, accessibles à tous et illustrées par de nombreux exemples de marques que les enfants connaissent.

L’auteur de cet album, c’est Cary Steinmann, un professeur d’université en Suisse, qui a travaillé comme stratège en marketing  pour différentes entreprises.

« Les enfants ignorent qu’il y a tout le temps du marketing, explique-t-il. Ils ne connaissent pas toutes les petites manipulations, la façon de créer une volonté artificielle de devoir avoir un produit de marque (parce que c’est la mode). Aujourd’hui, il y a même des influenceurs et influenceuses pour les enfants. De jour comme de nuit, les enfants sont manipulés par des professionnels comme moi ! Personnellement, j’ai fait longtemps du marketing mais jamais je n’ai accepté que ce soit pour des produits destinés aux enfants. »

© Cary Steinmann, Laura Simon, Elina Brasliņa (2020) Ting! Comment le marketing séduit le monde. Editions Helvetiq

« Dans l’agence où je travaillais, on faisait passer des interviews à des enfants des employés pour voir leurs réactions face à des produits de marques. Quand les enfants sont en confiance, ils ne mentent pas. Si on leur présente quelque chose qu’ils n’aiment pas, ils le disent. »


Dans l’album, Cary Steinmann utilise le terme manipulation. « Dans la BD, les enfants ne savent pas non plus comment la concierge connaît tout cela. A-t-elle travaillé dans une agence marketing? Cela reste un suspense. »

On nous vend de l’eau, en nous disant que c’est plus que de l’eau !

« C’est mon chapitre préféré!, dit Cary Steinmann. Quand j’ai enseigné le marketing à l’université, j’ai organisé des blind tests (des tests à l’aveugle) avec de l’eau. On a pris différentes marques connues. Chacun devait reconnaître les eaux en goûtant le contenu de différents gobelets sur lesquels il n’y avait que des numéros. Personne n’a réussi ! Même moi qui soutenais avoir une eau préférée, une eau suisse, en faisant ce test, je ne l’ai pas reconnue alors que je disais l’adorer car elle avait un goût particulier ! C’est un des trucs du marketing. Si je vous dis: l’eau de la marque X est particulièrement bonne pour la santé, vous le pensez et vous direz même que vous le sentez ! Cela fonctionne. Cela illustre la phrase: l’image, c’est la réalité. Et corriger une image (ce que l’on a créé comme image d’un produit), c’est très compliqué. »

© Cary Steinmann, Laura Simon, Elina Brasliņa (2020) Ting! Comment le marketing séduit le le monde. Editions Helvetiq

Le marketing, c’est un métier

Dans la BD, on entre dans une agence de marketing pour y découvrir les métiers et comprendre qu’il existe des stratégies différentes. Une équipe marketing va choisir de « pousser » un produit et une autre va décider plutôt « d’attirer le client » en lui donnant envie du produit.

Cary Steinmann met en évidence l’importance des groupes cibles (c’est une des missions importantes du marketing).

« Si vous créez un produit, par exemple un livre pour les enfants, vous devez prendre un thème qui n’a pas encore été choisi. Personne n’a écrit un livre pour enfants à propos du marketing. Je l’ai vérifié ! Quand on trouve pareille idée, on crée ce que l’on appelle une niche et on doit vérifier si on a un marché, c’est-à-dire des parents, des enseignants qui pensent que c’est important pour des enfants de lire un tel livre, surtout les passages sur les smartphones, les manipulations par Google, Instagram, etc. Les parents ne comprennent pas comment ça fonctionne. »

Le marketing d’influence pour les enfants aussi

« Les enfants sont touchés par les influenceurs et les influenceuses sur les réseaux sociaux. Jusqu’à présent, cela ne touche que les teenagers (c’est-à-dire les enfants à partir de 10 ans), pas encore les plus jeunes. Sur les réseaux sociaux, on est manipulé par des marques. L’idée de cette BD sur le marketing, c’est d’amener les enfants à avoir des réflexes, de se poser des questions. »

Et les enfants, peuvent-ils se servir aussi du marketing?

Dans la BD, Cary Steinmann invite les enfants à utiliser ces techniques du marketing pour mettre en évidence ce qui leur semble important.

« Si jamais les enfants veulent créer ou même vendre quelque chose, il faut toujours faire une stratégie, ce que j’appelle le QUOI, et puis interpréter ce qu’ils veulent faire en faisant un COMMENT. Je pense que c’est une technique ancienne. Pour se mettre en évidence, on fait soi-même du self-marketing: on cherche comment se coiffer, s’habiller… On cherche comment se présenter. En marketing, on ne dit pas présente mais positionne. »

Mais la sincérité a-t-elle une place là-dedans (dans le marketing)?

« Oui, et je pense qu’un vendeur d’assurances ou une banque doit avant tout rendre un service impeccable. Cela ne va pas suffire de dire qu’une assurance est cool… elle doit fonctionner ! Après, si l’assurance rend un bon service, le marketing est là pour dire comment les gens doivent la voir et cela, c’est de l’image. Toutes les marques le font. C’est rare d’avoir des marques qui conservent une image forte durant des années. J’ai essayé aussi de l’expliquer aux enfants. « 

Le marketing évolue-t-il bien ?

« Je trouve que le marketing de ces 10 dernières années est quasi totalement tourné vers les réseaux sociaux. En faisant du digital, les gens du marketing récoltent des informations sur les personnes pour leur faire des offres… et là, personnellement, je me sens espionné, je déteste ça ! C’est de l’ultra-manipulation quand vous êtes sans cesse espionné, qu’il y a toujours quelqu’un derrière vous qui regarde ce que vous faites. Depuis lors, j’ai quitté le marketing, je ne peux plus. J’ai continué à enseigner à l’université mais quand les étudiants me demandent mon avis, je le donne. J’espère que l’on aura un jour des lois qui interdiront ce tracking (c’est quand on est pisté, espionné). »