C’est l’émission Investigation de la RTBF qui a mis le phénomène en avant : de plus en plus de faux castings circulent grâce aux réseaux sociaux. Et malheureusement, de nombreux adultes, mais aussi des enfants, se sont déjà fait piéger.
Jean-François Sauvenier est le directeur de l’agence Ministar, une agence pour les comédiens et mannequins âgés de 0 à 12 ans. Ses domaines d’activité sont la publicité, la mode et la fiction (film, téléfilm, théâtre, etc.). On a discuté avec lui.

Monsieur Sauvenier, c’est quoi, finalement, le rôle de votre agence ?

C’est de mettre en relation des jeunes talents avec un client (photographe, directeur de casting, annonceur, etc.) qui cherche tel ou tel profil. Nous avons un fichier avec des enfants dont on pense qu’ils peuvent retenir l’attention de nos clients pour tourner une publicité, un film, etc. J’insiste, ce n’est pas l’enfant qui est le client.

Comment ça se passe, dans une agence dite sérieuse ?

Il y a toute une procédure. On passe par une demande de candidatures. Puis une rencontre. Il y a des papiers à remplir, une convention à signer. Mais le plus important, c’est avant tout de savoir si l’enfant a envie de se lancer dans l’aventure. S’il n’en a pas envie, on ne le fait pas. Même, et d’ailleurs surtout pas, si ce sont ses parents qui le poussent.

Faut-il fournir un « book » (livre avec des photos) pour « postuler » chez vous ?

Absolument pas. C’est d’ailleurs une arnaque de faire croire qu’il faut des books, parfois payés des centaines d’euros, pour entrer dans des agences de mannequins. En plus, ce book, il faudrait le refaire après quelques mois, car les enfants changent beaucoup sur un court laps de temps. L’agence fera elle-même le book, si collaboration avec l’enfant il y a. Le mannequin n’est jamais celui qui paye.

Qu’est-il important de savoir si on veut se lancer dans l’aventure du mannequinat ?

Qu’il ne faut pas faire ce qu’on n’a pas envie de faire. On a le droit de dire non, et ce n’est pas grave. Il ne faut pas le faire parce qu’on s’y sent obligé. Quand on s’engage, par contre, c’est important d’aller jusqu’au bout. Mais on doit surtout s’amuser, passer de bons moments. Si ce n’est pas le cas, on arrête. On doit se sentir bien, être d’accord avec tout ce qu’on nous demande et bien sûr, être toujours accompagné d’un parent. Si on se sent mal à l’aise ou que quelque chose s’est mal passé, il faut évidemment en parler.

Êtes-vous une usine qui produit des vedettes ?

Il n’est pas du tout question de faire devenir des enfants des vedettes. Le métier des enfants, c’est d’abord et avant tout d’aller à l’école. Faire des photos ou des vidéos, c’est un loisir, quelque chose que l’on fait de temps en temps, mais pas tous les jours. Et pas non plus pendant les heures d’école !

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En savoir plus

En Belgique, le travail des enfants de moins de 15 ans est formellement interdit par la loi. Pour certaines activités (dont le mannequinat et la comédie), une dérogation individuelle (autorisation) peut être accordée. « Mais les délais sont longs et toute une série de règles ne sont pas adaptées à nos réalités de travail, affirme Jean-François Sauvenier. La loi date. Nous souhaitons qu’elle soit révisée. Nous voudrions également que les agences professionnelles soient reconnues afin d’offrir une meilleure protection aux enfants. »
La question des enfants « influenceurs » n’est pas non plus réglementée par la loi belge.

Une liste de questions à se poser

Pour éviter de tomber dans le piège et « s’engager » avec une fausse agence, Jean-François Sauvenier a écrit une liste des questions importantes à se poser.

La voici :

1. Comment ai-je connu cette agence? Si c’est uniquement via les réseaux sociaux et si c’est elle qui est venue vers moi, je dois me méfier.

2. Quelles sont les coordonnées de l’agence? Est-elle facile à contacter, a-t-elle un numéro de téléphone fixe, une adresse vérifiable, répond-elle à mes sollicitations, etc.

3. Les frais de dossier sont-ils raisonnables ? (25-30 euros). Y a-t-il d’autres frais annoncés ? Quand on est mannequin, ce sont les clients qui vous paient pour le travail fourni. Ce n’est pas à vous de payer.

4. Quelle est la réputation de l’agence ? Puis-je contacter l’équipe ? Qui sont ses clients ? Puis-je les contacter et avoir des références ?  Cette agence est-elle connue des autres agences ?

5. Quel cadre juridique me propose-t-on ? Comment mes droits sur image sont-ils protégés ? Quelles sont les perspectives de contrat ? Quelles sont mes garanties ?

Jean-François Sauvenier insiste : « On ne devient pas « mannequin-vedette » du jour au lendemain. Il faut suivre un processus de découvertes, de rencontres, d’expérience et de tests.». Si la proposition est trop alléchante pour être vraie, c’est probablement qu’elle est fausse.